Consultation bidon

Consultation bidon

La Chambre d’agriculture a lancé – en pleine période de confinement généralisé – la consultation à propos de la charte des riverains intitulée “charte du bien vivre ensemble” que nous avons déjà présentée dans cet article. Cette consultation ne vous demande pas votre avis sur les mesures très graves pour les riverains de réduction des distances d’épandage. Elle ne vous demande pas votre avis sur l’usage des pesticides de synthèse si massif en Gironde. Par contre elle vous interroge sur le rôle des associations comme la nôtre. Pour toutes ces raisons au moins, elle nous semble parfaitement bidon.

Nous avons décidé de lancer une autre consultation que vous trouverez en ligne ici.

Ce qui pose problème

Le premier problème de cette charte, rédigée par les utilisateurs de pesticides, est qu’elle autorise les agriculteurs signataires à pulvériser encore plus près des habitations. En viticulture la distance de 10 m est divisée par plus que 3 : on passe à 3 m !

Les associations environnementales qui ont pu participer à deux réunions de travail, n’ont donc pas signé cette charte qui ne reprend aucune de leurs revendications de réduction de l’usage des pesticides de synthèse, ni leur interdiction à proximité des habitations, des écoles et établissements sensibles. La Confédération paysanne, la Coordination rurale et les syndicats du bio n’ont pas signé non plus.

Comment les organisations professionnelles agricoles justifient-elles ce mépris des exigences de santé publique que réclament de plus en plus de riverains et d’élus locaux ? Elles affirment que les agriculteurs signataires prendront en “contrepartie” des engagements sur les points suivants :

  • l’information préalable des riverains au moins 8 heures avant les traitements par SMS, 
  • le choix d’un matériel de pulvérisation plus performant qui limite les dérives

D’autres engagements apparaissent dans cette charte alors qu’ils relèvent selon nous d’une déontologie professionnelle élémentaire :

  • vérifier au moins une fois par an le réglage de son pulvérisateur
  • traiter en fermant les buses qui sont orientées vers les habitations
  • s’informer régulièrement des bonnes pratiques en lisant les bulletins techniques professionnels.
  • mesurer la vitesse du vent puisque la loi interdit de pulvériser lorsque celui-ci a une vitesse supérieure à 19 km/h.

Mais la proposition que nous avions faite d’installer des manches à air près des lieux sensibles semble visiblement trop compliquée pour les dirigeants de la Chambre d’agriculture alors qu’elle est d’un coût abordable. Cela permettrait pourtant d’avoir un témoin visible par tous.

Le point fondamental pour nos associations est la nature des produits pulvérisés : les CMR (cancérigènes, mutagènes, reprotoxiques), les PE (perturbateurs endocriniens) et les SDHI (succinate déshydrogénase inibiteur). De nombreux pesticides de synthèse épandus en Gironde sont des perturbateurs endocriniens qui peuvent, avec des doses infinitésimales, modifier gravement le développement des jeunes enfants. Les fongicides comme le boscalid ou le yaris, largement utilisés, sont dénoncés par de nombreux scientifiques pour les risques qu’ils font courir à l’ensemble du vivant (Voir ici) sans parler du Folpel que l’on retrouve partout dans l’air de Gironde, qui est un CMR.

Sur ce point crucial, aucun engagement ferme des professionnels de la Chambre d’agriculture n’a été pris. Le choix des pratiques « à haute valeur environnementale » est encore un nuage de fumée puisque le label HVE autorise bel et bien l’utilisation de ces produits dangereux. Nous avons également demandé à ce que la composition des produits pulvérisés puisse être rendue publique et soient enregistrée en mairie … cela n’a pas été possible.

Enfin la mise en place de haies (nommées dispositif écran dans la consultation) est, nous le savons aujourd’hui grâce aux enquêtes ATMO, une véritable mascarade. Voir ici

Une autre consultation

Aucun de ces refus n’apparaît dans la consultation de la Chambre d’Agriculture qui met en avant uniquement les quelques points positifs évoqués sans parler des dérogations de distance. Les associations Alerte Pesticides Haute Gironde et Générations Futures Bordeaux ont décidé d’organiser une autre consultation pour porter à la connaissance du public les conséquences de la charte et dénoncer cette mascarade.

Cerise sur le gâteau, le Ministère de l’agriculture vient d’annoncer que, “en raison du contexte Covid-19” même si les chartes n’étaient pas signées, ces réductions de distance pouvaient s’appliquer de suite . Or si le “contexte Covid-19” a un lien avec l’épidémie actuelle, cela devrait pousser le ministre à interdire les pulvérisations notamment des produits irritants ou nocifs pour les voies respiratoires qui devraient être proscrits !

En Haute Gironde, selon une enquête de l’ORSE (Observatoire régional de la santé et de l’environnement), la population concernée par une proximité habitation/parcelles viticoles se répartit de la manière suivante :

  • à 5m : 2 344 habitants
  • à 10 m : 7 600 habitants
  • à 50 m : 29 813 habitants

Soit un total de presque 40 000 personnes sur une population de 86 000 habitants. Voir ici

Il y a donc là une grave question de santé publique et de démocratie car les pratiques agricoles ne concernent pas seulement les organisations professionnelles agricoles. Nous devons pouvoir vivre ensemble sur les mêmes territoires, sans mettre en danger nos vies. Nous avons écrit à la Préfète de Gironde Mme Buccio pour lui signaler :

  • nos critiques sur cette charte et sur la façon dont est formulée la consultation de la Chambre d’agriculture ; notre demande d’invalidation de ce texte.
  • notre inquiétude sur le retour des pulvérisations de produits irritants ou nocifs pour les voies respiratoires en période d’épidémie de Covid-19 et le risque supplémentaire qu’elles font courir aux populations.

télécharger la lettre à la Préfète de Gironde ici

échos de presse en bas de cet article

Vous avez plusieurs moyens de faire connaître votre opinion avec la consultation officielle ou la consultation de nos associations (ou les deux). En tous cas, ne restez pas silencieux.

masque égaré dans vigne glyphosatée
masque égaré dans vigne glyphosatée, avril 2020

Echos de presse

Notre communiqué de presse commun APHG-GF-Bx à télécharger ici

Article sur SudOuest du 15/04/2020

Article sur Rue 89 Bordeaux du 16/04/2020

Emission Point chaud sur La Clé des Ondes du 15/04/2020 à écouter en podcast.

Article sur France3 Région Aquitaine du 17/04/2020