AgriCan est une étude de grande envergure sur la santé des agriculteurs commandée par la MSA. Elle consiste à suivre depuis 2005 une cohorte de plus de 180 000 cultivateurs pour décrire avec précision les liens entre cancers et activités agricoles (Agri = agriculture, Can = cancer). Le responsable du projet est Pierre Lebailly, épidémiologiste de l’INSERM. L’enquête semble relativement indépendante maintenant alors qu’à ses débuts, elle était financée en partie par l’UIPP. Cela n’est plus le cas depuis 2015.

Si les annonces faites lors du point d’étape en 2014 sur les premiers résultats de l’enquête semblaient réjouissantes pour les agriculteurs et ont beaucoup été utilisées par la FNSEA pour affirmer péremptoirement qu’il n’y avait pas de problème, la dernière livraison est beaucoup plus inquiétante.

Certes, la bonne nouvelle est que les agriculteurs – qui fument beaucoup moins que la moyenne – développent beaucoup moins de cancers du fumeur (poumons, gorge, larynx, œsophage…).

En revanche, les agriculteurs développent beaucoup plus certains types de cancers, comparés au reste de la population :

  • myélomes (+25 % chez les hommes, +22 % chez les femmes)
  • lymphomes (+47 % chez les hommes, +55 % chez les femmes).

En s’appuyant sur deux autres études scientifiques norvégienne et américaine, AgriCan établit un lien entre l’exposition au glyphosate, l’herbicide controversé, et des cas de lymphomes. Même risque pour le terbufos, un insecticide. Le lindane, un antiparasitaire pour bovins, serait impliqué dans les cancers de la prostate d’éleveurs qui est deux fois plus fréquent dans cette catégorie que dans la population normale.

L’équipe de recherche s’interroge sur le délai de rentrée appliqué en France qui est souvent bien moins long que celui appliqué au Canada pour les mêmes produits (au Canada, il est le résultat d’une mesure, pas en France). Elle s’interroge aussi sur la difficulté à évaluer la cancérogénocité des molécules, ce qui doit nous alerter : une molécule peut être non classée CMR un jour, et se révéler cancérigène après coup.

Pour le professeur Lebailly, il n’y a aucun doute : les agriculteurs développent un risque professionnel de cancers liés à l’utilisation de pesticides. Par ailleurs, depuis le dernier point d’étape en 2014 de nouveaux cancers apparaissent en excès : myélomes chez les femmes, lèvres chez les hommes et lymphomes plasmocytaires dans les deux sexes. 

En viticulture, la personne qui traite reçoit une dose de produits moins importante que celle qui taille, récolte, effeuille, trie, parfois sans équipement de protection et ça tout au long de l’année.